« Top 73 à 21 degrés sud! »
La voix grésillante avait des échos métalliques et les parasites la rendaient peu intelligible, mais c’était suffisant pour transmettre l’ordre d’intervention.
Frère Onoye mis les gaz et fit basculer le Stormraven, comme pour le lancer à l’assaut de l’escarpement au-dessus de lui. Cela fait presque une heure qu’il se maintenait en quasi stationnaire devant la muraille rocheuse dans l’attente de l’ordre d’intervention. C’est quelque chose qu’il n’aimait guère : à si basse altitude, la poussière de silice encrassait les moteurs et il pouvait presque ressentir la souffrance de la machine.
Pourtant il devait reconnaître qu’il y avait une logique dans le fait de se dissimuler ainsi à basse altitude : les gardes du IIème Sélénia déployaient une variante de la Valkyrie qui pouvait se révéler dangereuse pour un appareil lourdement chargé, et les maîtres des Sons of Vulcains avaient décidé que le chapitre avait subi trop de pertes pour que l’on continue à dilapider le sang de ses frères!
Plus question de tâches d’occupation ou de missions de contrôle des cités de Teth. Désormais l’heure était aux opérations ponctuelles, minutieusement préparées, que l’on exécutait à la vitesse de l’éclair avant de regagner la base. Jusque-là l’adversaire avait eu du mal à trouver la parade.
Frère Onoye consulta son holo par acquis de conscience : il avait parfaitmenent mémorisé le terrain. Il ouvrit le com intérieur
H – 12 minutes, prévenez frère Oroshi avec tout le respect possible!
L’escadron de Stormraven franchit la crête dans un ensemble parfait, Onoye volait au centre, un peu en retrait. Derrière lui, dans la soute, l’escouade de marines tactiques achevait de se préparer, et à l’arrière, derrière le filet de protection, un tech adressait une prière d’activation au sarcophage de métal arrimé à l’arrière, sur un ton qui mêlait le respect et la circonspection. Le pilote sourit intérieurement. Frère Oroshi animait le plus ancien des Dreadnoughts déployés sur Teth par le Chapitre. C’était un combattant hors de pair dont les faits d’armes étaient déjà légendaires quand lui-même avait reçu l’initation, mais c’était aussi un esprit que le temps rendait irascible et, aux dires de certains, irrationnel. Il fallait l’éveiller avec prudence.
Un par un les appareils déposèrent leurs escouades autour de la basilique en ruine. Les réacteurs soulevaient un épais nuage de poussière mais c’était plutôt une bonne chose pour les assaillants : les gardes en face étaient pauvrement équipés en appareils sophistiqués et il n’était pas plus mal qu’ils soient momentanément aveugles.
Quand chacun de ses pilotes eut rendu compte et amorcé le dégagement, Onoye mis le cap sur le vieux bastion bâti sur un épaulement au sud de la ruine. Ses coéquipiers n’avaient pas essuyé de tir antiaérien, mais il n’était pas assez novice pour se fier à cette observation : l’adversaire était parfaitement capable de retenir son tir pour se concentrer sur les cibles les plus menaçantes.
Une sorte d’intuition lui fit briser son approche d’un zig-zag, tant pis pour le tir en approche! Le rayon d’un laser illumina brièvement le ciel alors qu’il plaquait l’appareil au sol dans un grincement d’amortisseurs malmenés. Il était désormais trop près de la casemate : les bolts et les munitions plus légères ne pouvaient pas grand chose contre lui et il était au-dessous de l’arc de tir du laser.
Les marines de l’escouade débarquèrent pour se placer en protection, puis ce fut au tour de frère Oroshi de se libérer de son harnais. Dès qu’il fut au sol il commença d’avancer vers le bastion. Le tir adverse devint frénétique, mais rien qui puisse arrêter la marche du Dreadnought. Quand il fut devant la porte, ses poings de combat éventrèrent le métal comme s’il s’agissait d’une vulgaire tôle et les marines tactiques en profitèrent pour pénétrer à l’intérieur.
Onoyé attendit le signal pour reprendre de l’altitude. C’était une affaire réglée de son point de vue : l’escadron gamma était déjà en route pour récupérer le détachement, lui avait ordre de regagner la navette le plus rapidement possible pour un nouveau transport. Depuis quelques mois on avait testé cette nouvelle tactique avec succès : ce n’étaient jamais les mêmes appareil qui déployaient et qui recueillaient les escouades de manière à ce que l’adversaire ne puisse jamais savoir avec certitude la menace qu’ils représentaient.
Il était incontestable que la sécurité s’était accrue : cela faisait déjà une douzaine de missions qu’il effectuait sans même avoir à enlever la sécurité de ses armes de bord. Avec un petit sourire intérieur, il songea : « je suis un chauffeur d’autobus… ».
La volonté de dégager la IIème compagnie des combats inutiles et coûteux nécessités par l’occupation des principales cités de Teth, conduisit les Maîtres de la compagnie à privilégier assez récemment des tactiques plus mobiles et des opérations coup de poing permettant de tirer un meilleur parti des capacités tactiques des Space Marines.
Cela a conduit à un renforcement notable des moyens d’intervention rapide du contingent déployé sur la planète. A côté d’escadrons de motards plus nombreux, le Chapitre a engagé un certain nombre de transports de combat de type Stormraven capable à la fois de délivrer un volume de feu impressionnant, et de transporter des escouades et du soutien sur de longues distances.