Challenge d’écriture n°27 – Texte n°7

Organasolo

Alvin était un noble guerrier, vêtu de vêtements en peaux de bêtes et équipé d’un solide bouclier en bois aux couleurs de son clan, ainsi que d’une hache à double tranchant dont le maniement n’avait plus aucun secret pour lui. Le garçon, à peine âgé de 20 ans, avait déjà connu de nombreuses batailles, et vécu bien des horreurs que peu seraient à même d’imaginer. Mais aussi loin que remontait ses souvenirs, la bataille qui se déroulait là, sous ses yeux, était la plus sanglante et la plus horrible. Plus de deux mille hommes se battaient, au milieu des femmes et des enfants de son peuple qui cherchaient à fuir l’ennemi, courant en tous sens dans un épouvantable capharnaüm.

Quelques minutes plus tôt, le village avait été surpris par une attaque lancée par un clan voisin, mettant fin à une paix de plusieurs années. Une horde de cavaliers avaient commencé à piétiner tous ceux qui avaient eu le malheur de se trouver sur leur chemin, puis ils avaient bientôt été rejoints par des centaines de barbares à pied, assoiffés de sang. Aussitôt, les hommes du clan d’Alvin avait pris les armes et s’étaient opposés à l’agresseur, mais ceux-ci étaient bien mieux armés, mieux préparés, et plus nombreux.
Alvin voyait bien qu’ils n’avaient aucune chance…

Cependant, secouant la tête pour effacer ses sombres pensées, il esquiva une lance qui se ficha dans une botte de paille derrière lui, et lança un regard dans la direction opposé : il vit un homme courir vers lui, l’épée levée, prête à frapper. Il para le coup avec son bouclier, et de la main opposée, assena un violent coup de hache sur le casque de son adversaire, qui se fracassa, tout comme le crane en dessous, dans un craquement sonore. L’homme s’écroula, mort. Le jeune homme récupéra alors la lance et, visant soigneusement un cavalier à quelques mètres de lui, la lança ; elle pénétra dans le cou de l’ennemi, juste sous la lanière d’acier de son heaume, entrainant l’homme dans une chute mortelle. Sans prendre le temps de reprendre son souffle, il s’élança vers un autre barbare qui cherchait à rattraper Kaia, la jeune femme avec laquelle Alvin discutait quelques minutes auparavant. Le rattrapant, il le frappa violemment en direction du crane, mais l’adversaire esquiva et tenta de lui percer le ventre avec sa lourde épée ; le coup érafla le flanc droit du jeune garçon, qui, d’un coup de bouclier, fit reculer son ennemi. Se jaugeant du regard pendant quelques secondes, les deux belligérants se mirent à tourner lentement, attendant un signe de faiblesse de l’autre. Alvin se décida en premier, et frappa de sa hache la main droite, celle qui portait l’épée. Surpris, le gros barbare ne put esquiver et l’arme lui échappa, s’envolant quelques mètres plus loin… Désarmé, il se jeta alors sur Alvin, qui lui démolit la mâchoire avec la partie émaciée de son bouclier, ce qui eut pour effet d’assommer la brute, qui se retrouva genou à terre. Alvin l’acheva d’un solide coup de hache sur le sternum.
Au même instant, il ressentit une vive douleur dans le bras gauche ; se retournant, il vit une épée fichée dans son membre, l’autre extrémité étant tenue par un ennemi torse nu, uniquement vêtu d’un pagne masquant à peine ses cuisses musclées. Avant qu’il ne puisse réagir, l’épée s’était à nouveau élevée dans les airs, pour venir le frapper dans l’abdomen cette fois-ci, faisait jaillir un flot de sang…Lorsqu’il sentit l’épée se retirer à nouveau de son corps, il tomba à genou, un gout terrible de sang, son propre sang, au fond de la bouche. Terriblement affaibli, il rassembla toutes ses forces et lança sa hache à l’aveugle devant lui, et elle se ficha dans la hanche de son adversaire avec un craquement sinistre. Les deux hommes s’écroulèrent au sol en même temps.
Alvin se retourna sur le dos, et porta sa main valide au trou sanglant qui prenait la place de son nombril. Il lança alors un regard circulaire pour repérer les hommes de son clan… Ils étaient submergés par le nombre, et bien qu’ils se battaient aussi sauvagement qu’ils le pouvaient, le nombre de ses frères qui gisaient sur le sol ne cessait de s’accroitre, sous le poids des armes des barbares.
Un détail qu’il vit du coin de l’œil attira alors son attention. Malgré le voile terne qui commençait à assombrir sa vision, il tourna la tête en direction d’une femme, d’une beauté incroyable, vêtue d’une armure portée à même la peau, et qui renvoyait dans le ciel d’étranges lueurs, rappelant une aurore boréale. Montée sur un puissant étalon nacré, elle parcourait le champ de bataille sans se soucier ni des lances, ni des flèches, ni des coups portés par les combattants. Mais le plus étonnant était son regard, dans lequel se reflétait une fureur dévastatrice, et qui maintenant se posait sur Alvin.
Celui-ci sut alors, sans aucun doute, à qui il avait affaire. Les contes qui avaient bercé son enfance, et les légendes que ne cessaient de répéter les anciens du village, lui revinrent en mémoire. Il avait face à lui une des Valkyries, ces déesses au service du grand Odin qui venaient chercher sur les champs de batailles les plus valeureux guerriers, les plus dignes d’entrer au Valhalla, dans le palais des Dieux, pour en devenir les fidèles combattants. Cela ne pouvait alors signifier qu’une seule chose : il allait mourir, car seuls ceux qui vont mourir peuvent voir ces déesses… Il allait abandonner tout ce qu’il chérissait, sa petite amie, sa famille, tous ceux avec qui il avait passé les vingt années précédentes…quitter cette terre qui l’avait nu naître, abandonner son corps, pour mener une vie spirituelle dans la demeure d’Odin. Il se prépara mentalement pour ce grand voyage, son dernier voyage, celui qui le mènerait dans sa dernière demeure… il se remémora intérieurement son père, sa mère et tous ses ancêtres, ses amis, et esquissa du bout des lèvres, à voix haute :

« Adieu, je vous aime… »

Ces mots furent totalement assourdis par la fureur des combats qui se déroulaient autour de lui, mais peu lui importait…il était maintenant prêt. Il ferma alors les yeux, et laissa partir peu à peu sa vie, comme autant de sang qui s’écoulait de sa blessure. Serein, il attendit la Valkyrie, elle qui devait l’accompagner dans son voyage incroyable vers sa nouvelle vie, vers ce lieu mystique et lointain, où les braves demeurent à jamais…

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