Nam Prioris

2

La pluie s’est arrêtée, la nuit est tombée. En fait, c’est pas vraiment la nuit, mais une éclipse : Nam Prioris est une lune qui gravite autour d’une grosse boule de boue invivable qui nous cache le soleil de temps en temps. Ça plus les vraies nuits, j’vous raconte pas le bordel.

Enfin bref, à ce moment précis, on s’ennuie ferme. Spoon propose de passer le temps en supprimant à coup de rangers quelques rat-raignées, la vermine du coin, des rongeurs à huit pattes. Pour toute réponse, il se prend nos oreillers en travers de la tronche. Il a de ces idées parfois…

On grignote des biscuits de riz locaux tout en tapant le carton. Pour les mises, on joue des clopes. Je remporte quasiment tout ce qui fait bien râler la Nounou (j’m’en cogne comme c’est pas permis : il râle constamment). On discute pas mal, on raconte au ch’ti nouveau nos exploits sur les champs de bataille. Evidemment, la moitié de ce qu’on raconte est faux et l’aut’ moitié est grossièrement exagérée, mais le gamin nous écoute avec la plus grande des attentions. Brave petit.

Fffiiiiiii… BRAOOOM !

– C’est quoi ça ? s’inquiète Joshua.
– A vu de nez, j’dirais un mortier, répond Nounou, impassible.
– Ils n’osent quand même pas nous attaquer jusqu’ici ?!
– Bah, si.

Comme un seul homme, fusil-laser à la main, nous nous précipitons aux meurtrières. Dehors, c’est un véritable spectacle pyrotechnique. Ces bande-mous de Namiens nous bombardent, les Chimères Rouges répondent. Le grondement est assourdissant. Un peu partout, des fusées éclairantes explosent, illuminant notre base d’une sinistre lumière écarlate.

BRAOOOM ! BRAOOOM ! BRAOOOM !

Devant nous, des gerbes de terre se soulèvent. Toujours plus proches. Le prochain projectile va certainement nous arriver en plein sur la gueule.

Soudain, un hurlement. A une vingtaine de pas de nous, un gars est à terre. Spoon tente une sortie.

– Spoon ! Rapplique ici ! Joue pas au héros !

Il ne risque pas de m’entendre. BRAOOOM ! BRAOOOM ! BRAOOOM !

– Josh, avec moi.

La tête rentrée dans les épaules, réflexe bien vain contre un obus de mortier, nous piquons un sprint vers l’homme blessé. Il a les guiboles criblées de shrapnels. On le choppe par les épaules, il gémit de douleur et on cavale tous ensemble fissa jusqu’à notre abri.

– J’ai pas vu Spoon, halète Joshua, où est Spoon ?
– Là-bas. Je désigne du menton un tas de chiffon informe.

Je laisse l’estropié avec Josh. Ce dernier a eut sa dose d’émotion pour aujourd’hui. Vallenciaga fonce chercher un brancardier. La Nourrice et moi, on va récupérer Spoon. La fiesta est terminée, on n’entend plus que quelques tirs de ci de là.

Spoon est allongé devant nous, le visage plongé dans la boue, méchamment mort.

– Il a eut des tripes pour sortir comme ça, médite Nounou.
– Pour sûr qu’il en avait des tripes le Spoon, conclus-je, elles sont toutes là, par terre. Ouais, il en avait beaucoup…

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