Nam Prioris

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Trois jours! Trois jours qu’on est dehors en train de courir après les petits curieux qui empêchent notre état-major de dormir. Trois jours et trois nuits pendant lesquelles on a pas franchement dormi notre quota réglementaire, Nounou me le rappelle suffisamment. Le bon côté de la chose c’est qu’on a pas chaumé.

La première chose a été de déterminer combien de groupes on devait se farcir avant de pouvoir rentrer. Première bonne surprise : ils sont pas aussi nombreux qu’on aurait pu craindre, juste deux groupes de moins de 10 gus. Rien de compliqué. Doivent avoir du mal à recruter en face, ou alors on leur fait peur. Pensez, une mission près des lignes ennemies où se trouvent les terribles Dead Kings, ça doit foutre les jetons. Ou alors ils doivent vouloir faire leurs trucs discretos.

Deuxième bonne nouvelle, on s’est fait le premier groupe à la fin de la deuxième journée, pas de perte chez nous, un vrai travail d’orfèvres, ils ont rien vu venir et ont pas du sentir grand chose avant de se retrouver le nez dans la gadoue. On les a débusqué dans les restes d’un petit village en ruine, en train de faire le point sur leur position. J’ai cru comprendre qu’ils étaient pas d’accord sur la route à suivre pour je ne sais quel endroit. Sentinelles neutralisées par Gambit et son snip, nickel, fin de la besogne à la lame de 30, Nounou à la tête des bleus et nous en soutien lourd au cas où ils auraient merdé. Nounou a beau être ce qu’il est, il connaît son boulot et ils ont pas merdé ; groupe n°1 éliminé en quinze minutes chrono, au suivant.

On a regardé dans leurs documents, pas grand chose d’intéressant à priori mais j’ai tout pris pour nos cerveaux planqués dans leurs bunkers, je suis pas là pour cogiter à ce genre de trucs.

Depuis on patauge un peu mais je sens qu’on se rapproche. Bishop est parti aux nouvelles et devrait pas tarder à revenir avec des infos. Il aurait repéré des traces et préfère explorer le terrain seul pour être “plus à son aise” comme il dit.

Pendant ce temps on se prend un moment de récupération, on en a tous besoin. Wedge et Biggs sont vidés, ‘font moins les marioles depuis qu’ils ont dû ouvrir les carotides des Namiens avec Nounou. Faut bien que le métier rentre et on a jamais dit que ce serait une promenade de santé. Gambit est quelque part dans le coin, il monte la garde je sais pas où mais on peut lui faire confiance, personne ne nous surprendra. Nounou nourri son rat, j’ai bien envie de lui en coller une dans sa tête de rongeur mais la proximité de l’ennemi me rappelle à la raison et je ferai ça au retour.

Bishop est de retour, il arrive tranquille, un large sourire sur le visage, il les a trouvé. On remballe vite fait, Gambit nous a déjà rejoint, les environs sont clairs. Bishop me montre par signes codés où ils sont, pas loin, à peine deux cent mètres de nous. Je donne les instructions à chacun et on avance.

On arrive sur la zone, ils sont planqués au fond d’une cuvette naturelle entourée de petites collines dans des sortes de tranchées creusées par les tirs d’artillerie des dernières semaines. Ils se sont même vachement bien installés, ils se sont faits une cabane douillette avec un toit de tôles camouflé par de la terre et des débris au-dessus d’un trou un peu plus large que la moyenne, ils doivent pouvoir loger à quatre là-dedans. On repère vite les sentinelles, positionnement classique autour de la zone, reste trois Namiens en train de s’occuper comme n’importe quel troufion en mission, affûtage de lames et graissage de fusil.

Je sépare l’escouade en 3 groupes. Nounou sera au centre avec Murdock, Wedge et Biggs. C’est eux qui auront le plus distance à parcourir avant d’atteindre la zone cible, va falloir les couvrir. Sur la droite, Vallenciaga, Bishop et Josh. Ils sont les plus prêts de la sentinelle qui couvre le secteur, une fois débarrassé d’elle, ils seront pratiquement sur l’objectif. Je me cale sur le flanc gauche avec Gambit et Doky. Gambit devrait nous débarrasser des deux autres sentinelles et d’au moins un Namien au centre. Ensuite il n’y aura plus qu’à arriver en soutien du reste de l’escouade.

Un bon plan.

Nounou et Bishop sont en place, je fais signe à Gambit, son choix est fait, le coup part et la sentinelle tombe. Dans le même temps, Nounou déboule dans la cuvette en gueulant tout ce qu’il sait suivi des bleus et de Murdock. L’effet de surprise est totale, Gambit ajuste la deuxième sentinelle qui s’en va rejoindre son compagnon dans l’enfer Namien. Bishop aussi a entraîné son groupe en avant de manière plus discrète mais tout aussi efficace, la dernière sentinelle est tombée sous le tir nourri des fusils réglés à puissance maximale.

Les trois Namiens restant à l’extérieur se voient pris sous le feu de nos trois groupes et si les tirs venant du centre son pas forcément les plus précis, Gambit compense largement de son côté.Je me lève et suivi de Doky, je descend aussi dans la cuvette, Nounou et son groupe ne sont plus qu’à quelques mètres de la cible quand un Namien sort du trou aménagé. Grand et calme, il ne porte pas d’arme sur lui, pas comme les trois gus qui le suivent et qui ouvrent le feu sur le groupe de Nounou, les forçant à se plaquer au sol et à se planquer dans les premiers trous venus. Voilà de nouvelles cibles bien plus dangereuses.

Bishop, Josh et Vallenciaga ne sont pas dans leur ligne de vue et peuvent encore avancer sans se faire arroser. Gambit, de son côté, doit être en train d’ajuster le grand calme, cible logique et facile vu qu’il ne bouge pas. C’est à ce moment que je remarque que la pluie ne semble pas le toucher, je veux faire signe à Gambit du danger mais trop tard, le coup est parti. Je vois l’impact à quelques centimètres du crâne, ça fait comme si une pierre venait de toucher une flaque d’huile, la seule différence c’est que la balle n’a pas traversé, un champ de force mais qu’elle est repartie d’où elle est venue. Presque aussitôt Gambit se met à gueuler, pas le temps d’aller voir, faut s’occuper de la cible, le psyker.

Bishop a réussi à éliminer un premier Namien, Nounou, toujours en finesse, vient de balancer deux grenades qui mettent au tapis les survivants. On en profite pour se relever et foncer comme des dératés avant qu’ils récupèrent leurs esprits. Bishop est sur eux le premier avec Josh et Vallenciaga, ils se font un deuxième Namien pendant que Wedge et Biggs s’occupent du dernier, non sans que Biggs prenne un vilain coup de couteau au flanc. Bishop et Murdock se dirigent vers le psyker bien décidés à lui faire goûter trente centimètres d’acier. Alors qu’ils sont sur leur proie, je les vois décoller du sol et atterrir lourdement sur le dos, hors de combat. A ce moment-là, plusieurs choses semblent s’enchaîner, venant du sac de Nounou d’abord, un couinement qui ne fait pas de doute, Gus vient de se faire aplatir sous le poids de Nounou, puis le psyker qui se tient la tête à deux mains en tombant à genoux.

Voyant cela, je me précipite avec tout le reste de l’escouade encore debout sur lui pensant en venir à bout rapidement, Biggs lui porte un coup de baïonnette à la jambe. Le tordu pousse un cri inhumain et, se relevant brusquement, il nous fait je sais pas quoi je sais pas comment mais le résultat est spectaculaire, on se retrouve tous à au moins cinq mètres de lui dans la même position que Nounou et Murdock. La dernière chose que je crois percevoir avant de prendre un repos bien mérité c’est une série de tirs venant du snip de Gambit et le bruit de la chair qui s’éclate sous les impacts répétés de son arme, j’en compte plus de dix avant de sombrer pour de bon.

J’émerge quelques minutes plus tard devant la face hilare de Doky, coup de bol qu’il soit resté en retrait, c’est le seul à peu prêt en état.

– Et alors Sergent, on pionce ?
– Ta gueule Doky. Si j’ai le plaisir de te voir c’est que la mission est terminée ?
– Bien vu Sergent, levez-vous doucement, ça va tourner un peu au début.

Et le voila reparti pour voir les autres.
J’essaye de me mettre debout, ça tourne, je reste assis. Je suis pas le seul à avoir adopté cette position. Nounou est encore dans les vaps, Gambit est accroupi tenant son fusil à deux mains à coté du psyker en le regardant comme s’il voulait être sûr qu’il ne se relèvera pas. Je remarque qu’il manque un bout d’oreille droite à Gambit, ça pisse le sang, Doky devrait voir ça. Je lui en parle quand il repasse à côté de moi.

– Je sais, mais il ne veut pas que je le touche, on verra ça à la base.

Je chope la radio pour qu’on vienne nous chercher, on pourra pas rentrer dans cet état, un groupe de speeders va pas tarder. Le temps qu’ils arrivent, je récupère suffisamment pour me bouger et fouiller le coin. Je prends tout ce qui pourrait intéresser nos illustres chefs, pas grand chose.

Les speeders arrivent, on embarque comme on peut et après un dernier passage pour purifier “par le Feu et la Flamme” l’endroit, c’est comme ça qu’ils disent chez les volants pour expliquer un nettoyage au bolter et lance-flammes lourd, et on rentre à la maison.

Débarquement des speeders. Elle est loin la joyeuse troupe partie la fleur au fusil casser du vilain Namien, on s’en souviendra de cette chasse au cafard. Nounou est installé sur un brancard arrivé en urgence. J’entends vaguement Doky parler d’empoisonnement chimique, de contrôle psychique, j’y panne que dalle : je suis à moitié dans le gaz.

Je regarde passer le sac qui contient le corps du tordu Namien, on sait jamais ça peut intéresser nos tordus à nous, j’m’en fout en fait, je pense plus qu’à une chose, me pieuter et c’est là qu’arrive la cerise.

– C’est quoi ce ramassis de cloportes !?

Je regarde autour de moi, les gars ont posé leurs sacs en vrac, Gambit est assis sur le sien la tête appuyée sur son fusil, vidé, Josh tente de se mettre debout mais ses jambes semblent plus vouloir le soutenir longtemps. Non vraiment je vois pas à qui ça peut s’adresser.

– Sergent Stingray, je vous parle !

Ah tiens si, ça a l’air de nous concerner. Je me retourne et je me retrouve face à un joli uniforme tout propre. Je regarde nonchalamment les galons, tiens un Lieutenant, je devrais saluer mais j’ai comme un oubli. J’arrive juste à sortir d’une voix pâteuse.

– Mon Lieutenant ?
– Je vous ai demandé de vous tenir Sergent, ça ne m’étonne pas que vos hommes soient aussi minables !

Houla, je ne connais pas ce gus et je sens comme une onde d’antipathie me submerger, les gars ont l’air d’être de mon avis. Bon on ne va pas s’énerver, de toute façon on peut plus, le Major arrive. Du coup, on commence à se mettre au garde à vous mais Tuomas lève une main miséricordieuse et aux soupirs que j’entends dans mon dos, je mesure l’épuisement des gars.

– Repos soldats. Salut Stingray.
– Major.
– Lieutenant, je vois que vous avez fait connaissance avec la fine fleur des Dead Kings.
– Oui Major et je me permets d’attirer votre attention sur…
– Oui Lieutenant, nous verrons cela en privé. Sergent Stingray, le Lieutenant Van Haussmann sera votre supérieur direct pour les prochaines opérations.

Moment de flottement.

– A vos ordres Major.
– Lieutenant, allez me préparez le débrief’ pour le Capitaine de la mission du Sergent Stingray, je vous rejoints.
– A vos ordres Major !

Claquement de bottes cirées, salut réglementaire au poil, demi tour impeccable direction le QG, la cerise est partie.

– Content de vous revoir Sergent.
– Et moi donc Major. Tenez, voila tout ce qu’on a pu récupérer, j’espère que ça vous servira.
– Bon boulot, je vous revois une fois que vous aurez pris un peu de repos vous et votre escouade.
– Merci Major.

Tuomas repart dans son QG tout sec, nous on se dirige vers nos baraquements moisis. Je me sors une barrette de Lho, je suis trempé, j’arrive pas à l’allumer, je hais ce climat, je hais cette Lune.

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