Challenge n°14 – Texte n°7

Ygethmor

 » Là logiquement, ça devrait marcher…”

C’est ce que je me suis dit après avoir lu plusieurs fois dans ma tête les incantations. Les explications étaient pourtant claires : grâce à l’épée des anciens et à ce livre d’incantations -personne ne savait avec quels matériaux il avait été façonné-, on pouvait faire tourner en sa faveur un conflit, une guerre… quelle qu’elle soit.

On en avait sacrément besoin, avec cette confrontation inévitable qui nous attendait face aux Kazhagi. Si on ne faisait rien, on allait se faire écraser aussi facilement qu’on piétine un grabak, cet insecte nuisible.

A ma connaissance, cela faisait plusieurs centaines d’années que l’on n’avait pas utilisé l’épée des anciens.
Certains racontaient que ses pouvoirs étaient un mythe, d’autres la craignaient comme la pandémie la plus ignoble qui ait jamais pu exister.
Si il y avait la moindre chance pour que cette “magie” fasse pencher la balance de notre coté, aussi invraisemblable que cela puisse paraître dans l’état actuel des choses, alors il fallait que je le tente. Nous en étions à ce point.

Seuls mon bras droit et quelques uns de mes plus proches acolytes avaient été mis dans la confidence. Il fallait être très prudent, faire les choses avec beaucoup de précautions pour éviter tout dérapage.

– “Ca ne marche pas… j’ai pourtant tout fait dans les règles, j’ai suivi à la lettre les instructions… je ne comprends pas…”

Il était expliqué que l’incantation était réussie lorsque la lame de l’épée des anciens s’entourait d’un halo lumineux.

Cela faisait plusieurs jours que nous nous préparions avec le plus grand soin, sans omettre le moindre détail… Nous étions fin prêts… et cela faisait maintenant deux jours que nous tentions l’incantation sans succès…

La colère pris la place de la perplexité que j’avais éprouvé jusqu’alors… De rage, je jetai l’épée au sol, qui toucha les dalles de notre abri de fortune avec grand fracas. Le livre alla la rejoindre. Je m’emportai, les insultes fusaient, j’étais furieux contre moi, de mon impuissance, et contre cette satanée épée qui ne voulait pas luire.

Les autres me regardaient avec étonnement, figés… Ils ne m’avaient jamais vu perdre mon sang froid. Alors que j’hurlai tel un aliéné, ce que je n’attendais plus se produisit enfin… L’épée se mit à léviter, elle se positionna verticalement, lame pointée vers le ciel… Je regardais ce spectacle avec stupeur, lorsqu’ un sentiment de satisfaction intense m’envahit progressivement. J’avais réussi! Nous avions réussi! Enfin!

Le tonnerre gronda.

Soudain, une lumière aveuglante nous obligea à fermer les yeux. Je me protégeais le visage d’une main, quand un bruit assourdissant emplit la pièce. Le faisceau de lumière avait été projeté vers le ciel et, de ce fait, avait pulvérisé le toit de notre abri. Instinctivement, nous nous étions tous jetés à terre. Puis, plus rien…

L’épée retomba sur le sol.
Nous nous relevâmes précautionneusement.
Nos regards se croisèrent. Un bruit avait attiré notre attention, cela ressemblait à un glissement, un courant d’air, puis des bruits métalliques se firent entendre.

Je me précipitai le premier dehors. Ce que je vis me stoppa net dans ma course.

Dans le ciel, se trouvait une sorte de brèche semblant aspirer ce qui se trouvait alentour. J’étais stupéfait, elle ressemblait à celles que l’on décrit dans les histoires de voyage temporel ou inter-dimensionnel.

Ce qui m’horrifiait le plus était toutes ces formes humanoïdes qui portaient des armures aux allures démoniaques. Certaines étaient agrémentées d’ossements humains. Toutes avaient l’air menaçantes.

Je n’osais plus bouger. Un de ces monstres s’approcha de moi, son armure était plus élaborée que celle des autres, ce devait être le chef…

– “Les Dieux t’ont entendu, mortel! Es-tu prêt à nous servir pour obtenir ce que tu désires?”

Sa voix avait quelque chose de surnaturel…. une voix rocailleuse, presque comme celle d’un robot, mais avec toutes les intonations humaines.

Je réussis à prononcer un “oui” tremblant…

Dans les jours qui suivirent, tous nos ennemis potentiels furent exterminés par ces machines de guerre, et ceux d’entre nous qui refusaient de suivre leur voie et leurs Dieux subirent le même sort. Un véritable carnage.

Je m’étais engagé à les servir de peur de mourir, par peur des représailles. Mais, de jour en jour, je sentais grandir en moi une haine insatiable, qui m’effraya tout d’abord, et qui enfin ne fit plus qu’un avec moi-même.

Bientôt, cette soif de sang et de massacres au noms des Dieux s’emparera complètement de moi. Je la sens s’insinuer…

Bientôt, je n’aurais plus conscience de mon ancienne existence… ils m’ont promis la puissance, je ferais bientôt parti des leurs …

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