La ponctuation des dialogues

Après de nombreuses désillusions quant à la ponctuation des dialogues, je me suis replongé dans les arcanes du guillemet, du tiret et du !?…, ; (ce n’est pas un juron).

Je veux croire que je ne suis pas le seul à me poser ce genre de questions, aussi je vous propose cette synthèse, qui pourra servir à tous les scribes du Sanctum.

Deux méthodes sont possibles pour la ponctuation des dialogues :

  • La méthode tirets uniquement
  • La méthode guillemets + tirets

La méthode tirets uniquement

Il s’agit du fameux tiret cadratin.

Un tiret long est utilisé pour marquer le début de chaque nouvelle réplique, avec un retour à la ligne avant chaque tiret.

Mais comment faire le tiret cadratin sur un clavier ?

Utilisez la combinaison de touches ALT (laisser appuyé)  0151

clavier

et vous obtenez :  —

A noter cependant que le cadratin a tendance à disparaître au profit du demi cadratin ou –.

Là encore, un raccourci clavier utile : CTRL et touche – du pavé numérique.

D’ailleurs, n’hésitez pas à configurer votre traitement de texte (Word, Openoffice…) pour remplacer automatiquement un double — par – ou un triple — par —. Il ne faut pas se priver d’une vie plus simple.

Dans ce type de dialogue, les incises courtes sont séparées par une virgule.

En revanche, la virgule d’incise est supplantée par toute autre marque de ponctuation. En d’autres termes, elle s’efface sitôt qu’un autre signe (tel que  ! ou  ?) fait rupture entre le texte dialogué et l’incise.

De manière générale, à l’accolement de deux signes typographiques, préférez l’utilisation d’un seul, à savoir le plus « fort » (la virgule étant le plus « faible »).

Prenons un exemple :

— Fait pas chaud, hein ? fit un capuchon d’une voix de fausset. 

— Chhtt ! Il n’est pas question de se faire repérer maintenant. Quelle heure est-il ?

Mouvements de manches.

—    Désolé, je n’ai qu’un cadran solaire. Pas évident à cette heure.

Agacé, le plus large capuchon frappa le sol de sa canne.

— D’ici, on devrait voir la tour Celestica…

— Ça ne nous apprendra pas grand-chose, grommela le chef. Après minuit, ils éteignent les décorations…

La méthode guillemets + tirets

Les guillemets français («  ») sont utilisés pour marquer le début et la fin d’un dialogue ininterrompu.

Si l’intervention verbale se cantonne à une réplique isolée, elle sera introduite et close par des guillemets.

Les incises sont séparées de la partie dialoguée par une virgule (exemple 1).

Exemple :

Le duc s’assit pesamment sur une austère chaire de bois qui aurait fait passer un chevalet de torture pour un douillet cocon.

« Soyez plus précis, mon garçon », fit le vieil homme, reprenant le fil de la discussion.

Ce « Mon garçon » légèrement appuyé laissait entrevoir de longues journées à casser des cailloux avec un gros maillet.

Vous remarquez que l’incise  (fit le vieil homme…) a été « sortie » des guillemets du dialogue.

­­­­­De la même manière que dans la méthode des tirets, la virgule s’efface dans le cas d’une ponctuation plus « forte ».

Exemple :

Les couloirs du palais étaient encombrés du flot des valets qui revenaient de la salle à manger avec des plats à peine entamés.

Pâtés en croûte, côte de Mégaloth, paons en sauce, cakes…

« Que vont-ils faire de tout ça ? » s’étonna le Scythe qui salivait de nouveau.

En cas de discussion avec plusieurs répliques, les interventions verbales suivantes seront marquées par un tiret cadratin en début de paragraphe.

Exemple :

« Des photos de… d’un… d’un truc, là », tenta le Scythe en contemplant les photos échappées d’une pochette rose.

L’agent Dopple se pencha à son tour :

« C’est le gâteau d’anniversaire de notre bien aimé directeur. Deter est doué pour la photo. Il joue les photographes pour les fêtes de service.

— Drôle de gâteau.

— Manaos est un Ichtyen, un poulpe avec un cerveau géant. Il ne mange que des coraux prémâchés et des anémones de mer. »

De l’incision chirurgicale

Le Larousse définit une incise comme une proposition, généralement courte, insérée dans une autre. Les incises sont les fameux, dit-il, fit-il, s’exclama-t-il de nos dialogues.

L’objet de l’incise est d’identifier le locuteur. Cependant, notons qu’elle n’est pas indispensable à chaque répartie s’il n’y a pas d’équivoques sur celui qui prend la parole.

L’auteur peut, de surcroît, s’affranchir de l’incise lorsque le locuteur est la dernière personne à avoir agi.

Exemple :

D’une marmite s’éleva la voix étouffée du marquis de Beaumirail.

« Qui c’était ? 

— Une aide inespérée, souffla Estaminet.

— Pas trop tôt ! J’allais me dissoudre à force de mariner dans ce bouillon. »

Autant de moyens simples d’éviter des dialogues alourdis par de futiles fit-il.

Une incise ne peut être démesurément longue, à moins qu’elle ne clôture la zone dialoguée. Une incise dangereusement étirée, c’est un risque d’équivoque.

Exemple :

— On sait que Deter enquêtait sur un club révolutionnaire quelque part dans Conflux… énuméra le Scythe sur un doigt. Il chercha un second élément mais rien ne vint. C’est un peu mince.

Le lecteur pourrait entendre Il chercha un second élément mais rien ne vint comme une phrase prononcée par le Scythe. Il n’existe aucune règle à ce sujet : l’auteur est seul juge de la clarté de son découpage. A lui de recomposer l’incise de manière plus explicite en cas d’ambiguïté.

On pourrait gloser pendant des pages sur des subtilités complémentaires, le cas des alinéas intérieurs pour un long discours, des citations… mais voila une première base qui peut servir de référence pour les cas les plus courants.

Vous êtes encore là ? Allons, allons, le prochain challenge vous attend !


Cet article a été rédigé grâce aux précieux conseils de Agnès Rabotin, correctrice professionnelle et auteur du roman Le dernier oracle, disponible en auto-publication. (http://ledernieroracle.jimdo.com/).

Retrouvez d’ailleurs son nouveau blog, sur lequel Agnès partage son expérience d’auteur auto-publié : http://je-me-publie.jimdo.com/.


Les exemples de dialogue sont tirés du roman en construction : Révolution à Conflux (copyright Guillaume Woerner etc., etc.)

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