Lahmianes

Saronovich examinait les cartes de la région dans sa tente, tout en sirotant un verre de la meilleure vodka de tout Kislev. Il ressassait son amertume d’avoir été assigné à un poste aussi isolé dans les collines. Il n’aimait pas ce camp dans les bois obscurs qui délimitaient la frontière entre la Patrie Kislev et les royaumes nains des Montagnes du Bord du Monde. Mais c’était son devoir d’Ataman des Cavaliers Archers de surveiller les caravanes sortant des passes de la chaîne montagneuse.

Il entendit du bruit à l’extérieur de sa tente et deux de ses hommes entrèrent Ils étaient accompagnés d’une jeune fille d’une très grande beauté. Elle était jeune et frêle, sa peau était pâle et sa robe était en lambeaux. Elle tremblait de tous ses membres et affichait une expression de terreur intense.

” Ataman, nous avons trouvé cette fille sur un chemin de montagne. On dirait qu’elle a été attaquée, mais elle n’a pas dit un mot. Elle est trop terrifiée. Elle ne parle peut-être même pas notre langue. ”

” Intéressant. Apportez-lui un repas chaud et de quoi se vêtir. ”

” Bien monseigneur,” les deux hommes s’en furent et rapportèrent promptement ce que leur avait demandé leur officier.

Saronovich observait la fille et ne pouvait s’empêcher d’éprouver de l’affection pour elle, car elle lui rappelait sa fille de seize ans. Il remarqua aussi qu’elle toucha à peine à son repas, et sans aucun enthousiasme. Elle avait de toute évidence encore très peur. Le vieux soldat tenta de la réconforter en lui parlant doucement:

” N’ai pas peur. Nous sommes des amis. Tes amis. Comment t’appelles-tu ? ”

La fille leva les yeux vers lui et sembla comprendre ce qu’il disait.

” Mara, moi Mara. ” L’Ataman fut soulagé. Il ne reconnaissait pas son accent, mais il pouvait au moins communiquer avec elle. ” Que t’est-il arrivé ? où est ta famille ? Ta mère, ton père ? ”.

En ouvrant grand ses yeux innocents, elle répondit ” Montagnes… monstre… tous morts. Mara pas morte.” et elle se mit à sangloter. Saronovich fut ému et décida de la laisser un peu seule. Il sortit dans la lumière du soleil couchant et appela le sergent. ” Yuri, fais monter une tente pour notre invitée et double la garde cette nuit. Elle a mentionné un monstre et je crains que l’une des créatures maléfiques qui hantent ces montagnes n’ait attaqué le groupe avec lequel elle voyageait. On dirait qu’elle est la seule survivante. ”

” Tout de suite monseigneur! ” Et la nuit tomba.

Saronovich fut réveillé en sursaut par un terrible cri qui déchira la nuit. En un instant, il était dehors, sabre au clair. Où étaient les gardes, et pourquoi avaient-ils laissé s’éteindre les feux de camp ? Il perçut d’autres cris dans les baraquements et se rua dans cette Direction. Il pénétra prudemment Jans la grande tente, et vit à la Lumière diffuse des braseros qu’il était trop tard. Ses guerriers étaient morts. Certains cadavres étaient encore dans leur lit, la gorge arrachée. D’autres gisaient au sol, Démembrés et déchiquetés par ce lui semblait être les griffes de quelque créature à la force colossale. Un troll ! Non, impossible. Un tel monstre n’aurait jamais pu s’introduire dans le camp assez discrètement pour, surprendre ces guerriers expérimentés dans leur sommeil. quoi alors ? Comment le combattre ? L’Ataman était submergé par la peur et la colère. Puis une autre pensée le frappa comme un marteau de guerre : la fille ! Il devait protéger la fille. Il se mit à courir vers sa tente, mais fut stoppé par une nouvelle série de cris émergeant des bois. Certains des gardes se battaient encore et l’une des voix était distinctement féminine : elle était là ! Il s’approcha de la lisière où il pouvait clairement voir une torche brûler un peu plus loin. Il alla vers la lumière et manqua de trébucher sur le cadavre d’un garde. La fille était appuyée contre un arbre, une flèche fichée dans l’épaule. Ses habits étaient couverts de sang, mais elle était encore en vie, et c’était le plus important. Elle regarda Saronovich avec espoir, mais fixa aussitôt quelque chose par-dessus son épaule en criant ” Attention derrière! ”. Le kislevite se retourna, prêt à donner sa vie pour protéger cette innocente. Il scruta les ténèbres pour tenter de distinguer le monstre, et ne autre voix s’éleva dans son dos. C’était la voix langoureuse et sensuelle d’une femme adulte, au ton diaboliquement ironique : ” je vous ai pourtant bien dit de regarder derrière vous… ”

Ces mots, et le grognement sauvage qui les, suivit, furent les derniers sons qu’entendit l’Ataman Saronovich de Kislev.

Compilé par Kragor
Source : White Dwarf n°65 septembre 1999
Retranscrit en octobre 2007 pour Le Sanctum

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