La défense de Chrace

Monseigneur ce que l’on raconte est vrai: les morts marchent de nouveau, ils franchissent à présent l’entrée du défilé.” Le guerrier elfe qui s’adressait au prince était enveloppé d’une cape de fourrure blanche, trophée datant de la chasse que fut autrefois son rite initiatique.

Le Prince Aethis acquiesça avant de se tourner vers le mage qui se tenait à ses côtés.

“Daramas, mon frère, toi qui t’es montré avisé lors de nos périples en dehors de notre île, peux-tu me dire comment soufflent les vents de la magie en ce jour funeste ?”

Le mage leva la main pour former dans l’air des symboles arcaniques avant de répondre.

“Puissent les courants d’Ulthuan prendre ses fils en miséricorde. D’après ce que j’en vois, très cher frère, ils devraient jouer en notre faveur.”

“Parfait,” l’interrompit le Lion Blanc. Ce guerrier ne montrait pas la courtoisie requise devant un seigneur, qui plus était, un Porteur de la Flamme. Il se tenait debout et s’adressait à lui comme à son égal au lieu de mettre un genou en terre comme le dictait la coutume, mais Aethis savait que les Lions Blancs étaient des combattants loyaux et il n’allait pas le faire châtier pour son mépris des convenances.

“Mes éclaireurs sont venus me rapporter que l’ennemi était mené par des vampires. Il nous faudra tirer avantage de tout ce qui est en notre pouvoir si nous voulons avoir une chance d’arrêter ces créatures repoussantes.”

L’armée du noble Aethis s’en retournait vers Caledor après plusieurs mois de guerre en traversant le royaume de Chrace lorsqu’un groupe de Lions Blancs, les farouches chasseurs des montagnes, s’était présenté sur son passage. Leur Grand Lion avait informé le prince au sujet de la horde de morts-vivants qui marchait sur Tor Achare, la capitale de Chrace, sans rencontrer nulle opposition.

“Nous devons les empêcher d’atteindre la cité à n’importe quel prix. Les corps de défense de Tor Achare sont partis contenir l’invasion des Druchii, les morts-vivants pourraient donc s’y introduire sans peine.” Ainsi le capitaine des Lions Blancs conclut-il avant de partir rejoindre les siens.

Aethis ne laissa pas paraître son indignation devant le mépris de son rang affiché par ce rustre : après tout, les Lions Blancs assuraient la protection du Roi Phénix en personne, il était donc logique qu’ils ne tiennent pas un simple prince pour leur maître. Les remontrances viendraient après la bataille, il était pour le moment temps d’unir ses forces. Debout sur un piton rocheux, il se tourna pour faire face à ses troupes Celles-ci étaient épuisées, et lasses de se battre. Durant des mois elles avaient fait campagne sur Albion et ne désiraient rien tant que de retourner victorieuses chez elles pour rejoindre leurs familles.

“Mes amis, je sais que vos cœurs vous pressent de retrouver ceux que vous aimez. Vous vous êtes battus en braves sur l’île d’où nous revenons, mais je dois vous demander un nouvel effort.” Son regard parcourait les rangs de ses soldats qui demeuraient en parfaites formations immobiles, résultat de dizaines d’années d’un entraînement sans relâche.

“Sur Albion, nous avons combattu les forces des ténèbres qui se levaient pour conquérir ces terres détrempées et maudites. Elles sont de retour, pour s’en prendre à nos foyers. Les citoyens de Tor Achare ont besoin de notre assistance et nous ne pouvons manquer à notre devoir.”

il leva alors bien haut son épée. La vue de ce prince dans son armure mystique, forgée par les dieux qui avaient autrefois guidé son peuple, les émerveilla tous.

“Ils ne passeront pas.” Sur ces mets, il se laissa tomber au bas du promontoire et gagna les rangs des Gardes Phénix Il avait été le spectateur du courage dont tous avaient fait preuve sur Albion et savait qu’ils se battraient jusqu’à la mort pour protéger leur île.

***

Le regard du Prince Aethis errait sur la plaine. A l’exception des cadavres de chauve-souris et de quelques rares os qui finissaient de se désagréger, rien ne venait suggérer que leurs adversaires s’y étaient tenus, hélas. les corps de ses compagnons tombés suffisaient à le convaincre qû il n’avait pas rêvé toutes les horreurs dont il avait été le témoin.

Deux de ses guerriers s’approchèrent, encadrant la silhouette racornie d’un vieil homme dont la peau collait aux traits émaciés de son visage renfermé. Il portait autour du cou des amulettes gravées de symboles de pouvoir maléfiques.

“Monseigneur, nous l’avons trouvé terré dans un bosquet des environs. Quel sort comptez-vous lui réserver?”

Aethis fixa le vieil homme qui se débattait dans l’espoir vain de se libérer, tout en hurlant qu’on lui laisse la vie sauve. `

“Pourquoi devrais-je te laisser ta liberté, sombre humain. toi qui as mis un terme à la vie de tant de mes gens?”

“Libère-moi! Tu ne sais pas ce que tu fais. Mon pouvoir est grand et ceux que je sers reviendront te harceler si tu ne me libères pas sur l’instant,” répondit-il avant de cracher aux pieds du prince.

Celui-ci donna l’ordre à ses guerriers de libérer leur étreinte. Il tira alors l’épée de son fourreau et décapita proprement le sorcier qui se voyait déjà libre.

“Les morts d’Ulthuan dormiront en paix cette nuit au moins:’ murmura-t-il, puis il s’éloigna pour aider les siens à creuser les tombes.

Compilé par Kragor
Source : White Dwarf n°87
Retranscrit en juillet 2007 pour Le Sanctum

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