Challenge n°16 – Texte n°5

Rendar

Les étoiles. J’ai toujours été fascinée par ces petites étincelles dans le ciel. Minuscules sources de lumière brillante essayant de dispenser à travers l’espace glacial une chaleur réconfortante.

J’en recense des milliers, des millions, plus encore sans doutes mais je n’arrive pas à les compter toutes avant que l’une d’entre elle, par sa couleur, son éclat ou les arabesques qu’elle forme avec ses voisines sur la toile de la voute céleste n’accapare toute mon attention. Oui, je suis comme ça, un peu lunatique, un peu rêveuse, toujours préoccupée mais jamais à propos des mêmes choses.

Depuis toujours j’aime les regarder, imaginer graviter autour d’elles des planètes verdoyantes, me demandant si, de là-bas, une autre conscience regardait vers moi en se posant les mêmes questions. Quelle expérience magnifique que de tourner son regard vers le splendide ballet des trainées ionisées dessinant le ciel. Plonger tout entière dans la vision éthérée d’une nébuleuse colorée. Contempler, à l’abri, la balafre béante laissée par un trou noir telle une plaie ouverte sur le satin soyeux de la peau de l’univers.

Je ne m’étais jamais posée la question mais, aujourd’hui, je crois que si les étoiles m’attirent autant, c’est car elles me rappellent le temps où, moi aussi, j’avais mon étoile. Grande, chaude, lumineuse et aveuglante. Elle chauffait mon corps, me faisait tourner la tête et, dardant ses rayons gonflés d’énergie, m’assurait prospérité et richesse.

Puis elle s’était éteinte. Périclitant petit à petit, cette belle étoile, ce puits de magma en fusion, s’était tarie et le froid était alors arrivé. Mordant, cinglant, m’enrobant de tristesse et d’appréhensions. Toute la vie qui grouillait alors autrefois sur mon corps avait rapidement fini par dépérir et je m’étais retrouvée seule, abandonnée, glacée.

Même ma fille, ma compagne fidèle qui autrefois me tournait autour avec l’enthousiasme d’un jeune chiot. Elle qui entrainait sur son passage les liquides présents à ma surface dans un cycle perpétuel. Elle qui savait, quand ceux-ci devenaient trop fort, arrêter les rayons du soleil et plonger une partie de moi dans une obscurité temporaire mais réconfortante. Elle qui, percluse de tristesse, s’était écrasée sur mon corps meurtrit, me balafrant et m’arrachant une douleur atroce.

Sur huit, j’étais la seule de mes soeurs à abriter en mon sein la vie mais elles ont soufferts autant que moi de l’extinction. Se mettant à dériver dans l’espace et se laissant mourir de chagrin devant la perte de leur astre radieux. Moi même, sans le vouloir, je me suis mise à m’éloigner de l’endroit où je m’étais trouvée des millénaires durant. Je souffrais tellement de ne plus sentir l’attraction bienveillante de mon étoile, elle qui maintenait la cohésion entre nous.

Je savais pourtant bien que ce jour arriverait, aussi certaine que j’avais déjà vu d’autres étoiles s’éteindre mais, pas si vite, pas maintenant, pas alors que j’avais encore l’impression d’être au balbutiement de ma vie.

Des jours durant, j’avais espéré que ces petits points horriblement distants que je contemplais au loin puissent arriver à m’envoyer un peu de chaleur, un peu de réconfort. Que le coeur qui m’animait autrefois se remette à battre aussi fort qu’aux premiers jours.

Mais tout espoir était vain. Je ne pouvais plus rien faire d’autre que les contempler, remplie d’amertume, de nostalgie et attendant. Attendant la fin qui, j’en étais certaine, ne tarderait pas à venir, me dépouillant de la faible conscience qui m’habitait encore.

Ainsi va la vie, des planètes naissent dans de retentissantes explosions de matières alors que d’autres meurent, oubliées, dérivant dans l’espace loin de leur gloire passée, n’étant rien d’autre qu’un caillou hors de contrôle. On à beau se dire que c’est le cycle. Que, pour toujours, les choses se passeront de cette manière. Qu’il y à eu un avant mais qu’il y aura également un après. Cela n’éloigne pas la tristesse de se savoir à la fin de sa vie.

Mais je ne devrais pas vous dire ça. Je vous prie de m’excuser, la vue du spectacle étincelant d’un ciel étoilé à toujours provoqué en moi une forte émotion. J’ai du divaguer. Je pense qu’il vaudrait mieux que je m’endorme.

Oui, m’endormir. Et ne plus jamais me réveiller.

Mais, s’il vous plait, avant que je ne ferme les yeux, souvenez vous de moi. Rappelez-vous qu’autrefois, il y a des milliards d’années, tournait autour d’une étoile appelée soleil, une planète merveilleuse, vivante, chatoyante de couleurs verte, bleue, ocre et qui avait pour nom… La terre.

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